samedi 13 octobre 2007

La morale anarchiste de Kropotkine

Pierre Kropotkine dénonce aussi bien les morales bouddhiste et judéo-chrétienne (modèles d’une vie amputée) que les " pourritures fin-de-siècle " (modèle d’une vie dégénérée).

" Cette morale n’ordonnera rien. Elle refusera absolument de modeler l’individu selon une idée abstraite, comme elle refusera de le mutiler par la religion, la loi et le gouvernement. Elle laissera la liberté pleine et entière à l’individu. Elle deviendra une simple constatation de faits, une science.

Et cette science dira aux hommes : Si tu ne sens pas en toi la force, si tes forces sont juste ce qu’il faut pour maintenir une vie grisâtre, monotone, sans fortes impressions, sans grandes jouissances, mais aussi sans grande souffrances, eh bien, tiens-t’en aux simples principes de l’équité égalitaire. Dans des relations égalitaires, tu trouveras, à tout prendre, la plus grande somme de bonheur possible, étant donné tes forces médiocres.

Mais si tu sens en toi la force de la jeunesse, si tu veux vivre, si tu veux jouir de la vie entière, pleine débordante – c’est-à-dire connaître la plus grande jouissance qu’un être vivant puisse désirer -, sois fort, sois grand, sois énergique dans tout ce que tu feras.

Sème la vie autour de toi. Remarque que tromper, mentir, intriguer, ruser, c’est t’avilir, te rapetisser, te reconnaître faible d’avance, c’est faire comme l’esclave du harem qui se sent inférieure à son maître. Fais-le si cela te plaît, mais alors sache d’avance que l’humanité te considérera petit, mesquin, faible, et te traitera en conséquence. Ne voyant pas ta force, elle te traitera comme un être qui mérite de la compassion – de la compassion seulement. Ne t’en prends pas à l’humanité si toi-même tu paralyses ainsi ta force d’action.

Sois fort, au contraire. Et une fois que tu auras vu une iniquité et que tu l’auras comprise – une iniquité dans la vie, un mensonge dans la science, ou une souffrance imposée par un autre -, révolte-toi contre l’iniquité, le mensonge et l’injustice. Lutte ! La lutte, c’est la vie, d’autant plus intense que la lutte sera plus vive. Et alors tu auras vécu, et pour quelques heures de cette vie tu ne donneras pas des années de végétation dans la pourriture du marais.

Lutte pour permettre à tous de vivre de cette vie riche et débordante, et sois sûr que tu trouveras dans cette lutte des joies si grandes que tu n’en trouverais pas de pareilles dans aucune autre activité.

C’est tout ce que peut te dire la science de la morale. A toi de choisir. "


Existe-t-il encore des SOHEI dans les monastères d’Asie ? Des moines guerriers, bodhisattva et preux chevaliers de l’éternel dharma, combattront-ils les prédateurs capitalistes, les maîtres du monde et leurs valets obséquieux ?